Blog d'information et de communication de l'Union Départementale des Syndicats CGT de la Santé et de l'Action Sociale du secteur Public et du Secteur Privé du département de la Manche (50)
Syndicat National CGT des Affaires Sanitaires et Sociales
Grippe H1N1 : Missions des DDASS sacrifiées,
agents des DDASS en difficulté et pourtant méprisés !
La gestion des centres de vaccination se fait en dépit du bon sens. Pourquoi ? Parce qu’elle désorganise toutes les administrations (Etat, territoriale, hospitalière), ainsi que les professions libérales.
D’un côté, des administrations hospitalières qui usent de leur imagination pour organiser les services, afin de gérer au mieux l'éventualité d'une crise sanitaire générée par la H1N1, en dépit d’un manque chronique de personnel ;
D’un autre, des personnels de l'Etat qui abandonnent leurs missions pour se réunir sans cesse, afin d’essayer de comprendre et synthétiser les directives, tout azimut et toutes contradictoires du ministère ; s’arrachant les cheveux pour improviser des centres de vaccination, sans directives claires, sans coordination, avec ordres et contre-ordres venant du ministère et de la préfecture ;
Des personnels territoriaux ne sont pas en reste, mobilisés par les mairies qui prennent en charge des centres de vaccination, notamment le coût (achat obligatoire de réfrigérateurs pour stocker les vaccins, de serre-files…)
Devant un tel désordre, personne quasiment ne se porte volontaire, aussi bien parmi les personnels administratifs, médicaux, que paramédicaux.
Très peu de médecins et d’infirmières libéraux se sont portés volontaires, ne souhaitant pas perdre des journées de travail (qui ne sont indemnisées qu’à raison de trois consultations par heure), et encore moins abandonner leurs patients.
Quelle est la parade du ministère : la réquisition ! Ce sont donc les agents des DDASS, sous les ordres du préfet, qui procèdent à des « réquisitions », à partir d'une liste, et doivent rappeler chacune des personnes « réquisitionnées » pour s'assurer qu'elles vont bien venir vacciner...
Le cadre d’intervention des fonctionnaires mobilisés est plus que flou en terme de compensation du temps travaillé : rémunération, récupération, les différences d’un département à l’autre sont notables…Des personnels sont parfois requis "en dehors des clous", sans arrêté préfectoral.
Les directeurs disent ici qu'il y aura indemnisation. D'autres disent là que ce sera du temps de travail normal puisque les agents iront dans les centres de vaccination sur leur temps habituel. Exit les heures supplémentaires qui avaient motivé certains des volontaires suite à la circulaire du 22/10/2009.
La situation justifie-t-elle vraiment, ce qui sera, pour des questions d’assurance, assimilé à une réquisition ?… les Plans de Continuité de l’Activité mis en place sous couvert de grippe vont servir à gérer la cacophonie engendrée par la RGPP avec la partition des services, autant qu’ils sont le prélude à une organisation du télétravail au sein de nos services. C’est une nouvelle tentative pour tester notre résistance, pour nous faire travailler plus et bien sûr réaliser des économies sur le dos des fonctionnaires...
Sans s’attarder sur le ridicule de la situation (certains médecins réquisitionnés partis à l’autre bout du monde en vacances, ou l’un d’entre eux décédé), on peut imaginer dans quelles conditions et dans quel stress travaillent les agents des DDASS : attendre toute la journée des directives claires pour faire signer des arrêtés de réquisition prévues dans deux jours, à 7 heures du soir, appeler au téléphone les personnes réquisitionnées, être le défouloir des professionnels médicaux et para-médicaux qui en ont assez de tout ce battage médiatique autour de H1N1, être mobilisés pour faire fonctionner des centres de vaccinations alors que ce sont eux qui sont en contact avec les populations les plus fragiles.
Certes, les vaccins contre la H1N1 étant conditionnés en lot de 10 doses, leur utilisation pouvait peut-être poser un problème de stockage dans les cabinets des généralistes. On peut s’interroger au passage sur les conditionnements imposés par les laboratoires qui ont fabriqué le vaccin (on se demande qui commande : l’Etat ou la finance ?) et le gâchis qui en résulte dont la presse s'est fait l'écho. En effet certaines doses non utilisées se périment et doivent donc être détruites !
Mais sans cette politique de privatisation de la santé et de coupes sombres dans les dépenses publiques, les dispensaires et les centres de santé communaux qui disparaissent peu à peu, pouvaient jouer ce rôle de relais permanent auprès de la population et réaliser la vaccination.
Le scandale est bien là : il s’agit pour le ministère de cacher la misère, le manque croissant de personnel dans les hôpitaux, le numérus clausus imposé pendant des années, qui a engendré une mauvaise couverture médicale, la suppression de centres de santé communaux… Or, une bonne prise en charge médicale de toute la population doit reposer sur des structures et des équipes permanentes, l’accès de tous à des soins permanents et à une médecine de prévention, de proximité et de qualité.
Il n’est pas inutile de citer une étude réalisée par le centre hospitalier américain pour enfants de l’université Johns Hopkins (à paraître dans le Journal of Public Health) qui révèle que sans couverture maladie, un enfant qui tombe gravement malade, a 60 % de risques supplémentaires de mourir par rapport à un enfant assuré.(1)
Il ne faut pas se leurrer, la gestion de la vaccination contre la H1N1 et la mise en place de plans de continuité de l’activité annoncent la destruction des administrations et des services publics, prévus par la RGPP. Il n’existe actuellement que deux priorités : la grippe et les ARS. En effet, pendant que les agents abandonnent leurs tâches pour gérer ces centres de vaccination de fortune, les missions des DDASS sont délaissées, on en oublierait que les Directions Départementales de la Cohésion Sociale se mettent en place et qu’elles seront les parents pauvres de l’administration sanitaire et sociale. En attendant, l’exposition au radon de l’habitat, ce n’est pas urgent, la lutte contre la tuberculose, la coqueluche, ce n’est pas prioritaire. Les problèmes de trésorerie de fin d’année des hôpitaux, ça peut attendre 2010… Après l’épidémie de la grippe, les agents sont supposés rattraper aisément le temps perdu, une pure spéculation lorsque l’on sait que déjà le personnel de contrôle manque. Quel mépris pour ce que représentent des semaines et des mois de travail sur l’élaboration des projets médicaux de territoire, ou bien sur la prévention du saturnisme !
La mise en place des plans de continuité de l’activité, destinés à organiser les services en cas d’épidémie, n’est pas anodine : en hiérarchisant les missions, elle affirme implicitement que les missions dites non urgentes (c’est-à-dire pratiquement tout saut la grippe) relève du superflu. C’est un cadeau fait aux préfigurateurs, pour lesquels il ne reste plus qu’à utiliser le PCA pour supprimer les « doublons »(2). Le rêve !
La technicité des postes des missions sanitaires et sociales est niée, puisqu’en fonction du PCA, les agents sont censés se remplacer au pied levé, ce qui est impossible, même avec des fiches de procédure : la procédure d’hospitalisation d’office n’a rien à voir avec la procédure d’hébergement d’urgence, encore moins avec la procédure d’inscription des professions libérales sur le fichier ADELI.
Voilà comment sont dévalorisées nos missions et comment le travail des agents, leur connaissance du terrain, leur reconnaissance par les partenaires sont sous-estimés pour justifier leur disparition.
Malgré le vote de la loi HPST, vous pouvez compter sur la CGT pour continuer à se battre contre le démantèlement des missions sanitaires et sociales. Nous réaffirmons haut et fort :
- Que la séparation du sanitaire et du social est une erreur fondamentale que nous paierons cher dans les années à venir !
- Que la loi HPST et les ARS vendent aux appétits de groupes financiers notre santé individuelle et collective. L’exemple de la misère sanitaire des Etats-Unis doit nous faire réfléchir !
- Que les DDCS et les DDCSPP seront les parents pauvres des services de l’Etat.
- Que la défense de nos emplois, nos missions sanitaires et sociales, d’un système de santé juste et équitable, de la Sécurité sociale, en un mot le service public, n’est pas un combat ringard.
(1) Cette étude s’appuie sur l’examen de 23 millions de données hospitalières dans 37 Etats américains entre 1988 et 2005.
(2) Dixit Claude Evin, préfigurateur ARS Ile de France, lors de sa visite aux agents de la DASS de Paris le 4 novembre dernier.
La mauvaise organisation de la campagne de vaccination et les surcharges de travail qu'elle impose, met en difficulté nombre d'agents dans les services. Vous n'en êtes pas responsables, ne vous laissez pas faire !
Les réquisitions ne peuvent être menées que par le préfet et selon les formes règlementaires.
N'hésitez pas à appeler le syndicat pour vous faire aider ou demander conseil.